« Le philologue est comme un géologue qui, en étudiant une roche, en identifie la formation, les dépôts et les couches, cherchant à savoir si elles ont été érodées par le temps… »

« Aucun domaine n’est peut-être aussi attirant et n’absorbe autant la curiosité humaine que l’archéologie et l’écriture, qui est en soi une forme d’archéologie, » écrit Artaches Martirosyan, docteur en philologie et spécialiste des manuscrits médiévaux.

En mettant en avant le rôle crucial de la situation géographique et des conditions naturelles de l’Arménie dans son histoire politique, il explore « les campagnes religieuses qui accompagnaient les conquêtes politiques » et compare l’inscription persane sur Shapuh, qui « éleva les mages à une position de supériorité et de respect », avec la description donnée par Khorenatsi, soulignant leur ressemblance.

Ainsi, il est une fois de plus prouvé que les vieux récits et mythes ont souvent été « remaniés » au fil du temps.

« Khorenatsi, en décrivant les réformes introduites par Artashir en Arménie, écrit : ‘Il encouragea encore plus le culte des mages, et ordonna également de maintenir inextinguible le feu d’Ormazd sur Bagnin, à Bagavan. Mais ce qu’avait fait Vagharshak – la représentation de ses ancêtres avec le soleil et la lune à Armavir, transférée ensuite à Bagaran puis à Artachat – Artashir les détruisit.' »

« C’est si véridique qu’on pourrait croire que l’historien a extrait cela directement de l’inscription de Kartir… »

« …Nous avons discerné une certaine similitude dans ces récits :
Dans les deux cas, les dieux sont reniés, et les demeures des divinités rejetées sont détruites, pour être remplacées par des autels ou des sanctuaires.

Dans l’inscription de Kartir et dans les écrits d’Agathangeghos, on trouve des phrases étonnamment semblables. Chez Kartir, il est dit : ‘Les démons se retirèrent du pays et furent bannis. Ce fut une grande disgrâce pour les démons.’
Agathangeghos, de manière très similaire, écrit : ‘Les démons, devenus des fuyards, s’éloignèrent vers les terres de Khlat,’ et ‘les démons noirs, devenus invisibles, se dissipèrent dans les lieux comme de la fumée.’
Ici aussi, les démons ont été grandement humiliés. Ici aussi, ils ont subi un coup fatal et une grande souffrance.
‘Les images de leurs dieux furent brisées,’ écrit Kartir.
‘Leurs images furent brisées,’ ‘ils brisèrent l’image dorée de la déesse Anahit,’ rapporte Agathangeghos. »

« Sur l’ordre de Shapuh, Kartir confère d’importants privilèges aux mages, et des temples d’Ahura Mazda ainsi que des autels du feu s’élèvent partout.
De même, Grigor, ‘par décret souverain du roi et avec l’accord de tous’, érige des croix et des églises : ‘Et dans toutes les villes d’Arménie, ainsi que dans les villages, hameaux et forteresses, il fit apparaître des lieux de culte pour Dieu.’

Ces similitudes ne sont pas fortuites.
Elles découlent de la même nature, celle de se contredire mutuellement. »

« Le zoroastrisme avait une certaine implantation ici (en Arménie, avant l’adoption du christianisme) et possédait une tradition.
Artashir ordonna de ‘maintenir le feu sacré d’Ormazd toujours allumé’, ce qui signifie qu’il existait déjà.
Le zoroastrisme était en contact avec la religion arménienne depuis longtemps. »
(Citations tirées du livre Maštoc d’A. Martirosyan, pages 94-95)

« Dans divers récits médiévaux, les chroniqueurs mentionnent les ‘Arévordiner’, ou ‘Enfants du Soleil’, parmi les Arméniens qui avaient refusé la religion imposée par des étrangers, les décrivant comme étant ‘de la nation et de la langue arméniennes’. Certains les considéraient comme des disciples de Zoroastre, le mage.

‘… Il reste incompréhensible pourquoi un Arménien authentique se serait appelé « Enfant du Soleil ». Était-ce parce qu’il vénérait le soleil ? Alors pourquoi les anciens adorateurs du soleil arméniens d’avant le christianisme ne portaient-ils pas ce nom, alors que leurs supposés descendants apparaissent avec cette nouvelle désignation au XIIe siècle ?’ s’interroge le linguiste et critique littéraire arménien Grigor Vantsyan dans son étude La question des Enfants du Soleil, en fouillant dans de petits fragments de manuscrits anciens. »